Auguste Martin

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Auguste Martin père et fils

La fabrique Martin est dirigée par Auguste père et fils de 1875 à 1937, avec une éclipse de 1930 à 1935.

Auguste Martin (1838-1900)

C’est en 1866 qu’Auguste Martin, originaire de Lyon, s’installe avec sa famille à Ardon en Suisse. Il travaille aux Forges pour la Société des Charbonnages et hauts fourneaux du Valais jusqu’à leur dissolution en 1870. Entre 1871 et 1874, il se lance dans le commerce de bois, en restant sur le site des Forges dont il occupe désormais la scierie. Par annonce dans la Gazette du Valais, il propose la fourniture de bois de chauffage et de construction.

En août 1874 il dépose un brevet, en France, pour un pantographe destiné à la production des caractères en bois. Dans le même temps, par annonces dans la Gazette du Valais on apprend qu’il cherche à se constituer un stock de bois de poirier. Puis, en 1875, il fonde sa fabrique de caractères en bois.

Il a un fils, également prénommé Auguste (1862-1942) et une fille, Adèle (18..-1936) qui épousera un de ses dessinateurs, François Berche, qui prendra une place importante au sein de la fabrique.

Auguste Martin fils (1862-1942)

Auguste fils est né à Lyon. En 1895, il épouse Jeanne Bonvin-Chappuis. Il a 38 ans à la mort de son père, en 1900, quand il prend la tête de la fabrique. Il en sera directeur, puis directeur commercial, appuyé par son beau-frère François Berche, chef de la production puis directeur de la succursale de Paris.

La succession des raisons sociales

La fabrique que crée Auguste Martin en 1875 prendra plusieurs noms, statuts et régimes de sociétés jusqu’en 1943.

A. Martin & H. Coderey, 1875-1876

En août 1875, Martin s’associe à Henri Coderey pour lancer la fabrique A. Martin & H. Coderey. Il la dote ainsi, comme en témoigne l’une des premières publicités connues (voir illustration), d’une emprise à Paris, au 8 rue Mazagran, dirigée par Coderey. Mais la fabrication est réalisée sur le site des Forges à Ardon. Cette raison sociale n’est en usage que pour les années 1875-1876, dans quelques publicités et sur le premier catalogue de spécimens.

Publicité de septembre 1875 parue dans La Typologie-Tucker et Circulaire Caslon : recueil de l'imprimerie et de la lithographie : revue bibliographique, n° 29 Vol. 1, septembre 1875

Le contenu de la publicité en lui-même illustre l’ambition de A. Martin. Il y vante – dans une publication professionnelle française (Tucker, son éditeur, est également le représentant de Caslon pour la France) – la production d’une nouvelle fabrique suisse (le marché français en compte au moins 6 à cette date !), avec une succursale parisienne. Le caractère mécanique de la fabrication est annoncé en 3 langues, indiquant que Martin vise d’emblée un marché international. La mention d’un pantographe exclusif breveté en France et de “machines spéciales” n’est pas anodine. En effet, à cette date, il est le premier à revendiquer travailler au pantographe . Sa concurrence directe en France (principalement à Bressuire) travaille à la main ou de façon mixte (main et fraiseuse) mais pas au pantographe. Seul Charles Bonnet utilise peut-être déjà ce type de machine. En plus des produits de son catalogue, il propose le travail à façon, en n’importe quelle taille, sur simple envoi d’un modèle.

Auguste Martin a une vision claire de son projet commerciale. On ne connaît pas la date à laquelle l’idée lui vient de passer du commerce du bois à la fabrique de caractères, mais il le fait de façon très méthodique :

  • Dépôt d’un brevet pour un pantographe destiné à la production de caractères en bois en 1874 (voir plus bas) ;
  • constitution d’un stock de bois propre à alimenter sa production ;
  • implantation d’une succursale à Paris dès la création de la société.

Le tout se concrétise par la publication, fin 1875, d’un spécimen de plusieurs centaines de références.

A. Martin & Cie, 1877-1930

Ce lancement ambitieux sera peut-être la cause, en 1877, de la dissolution de la société en raison de difficultés avec les créanciers. Coderey n’apparaît plus dans le nom de l’entreprise, on perd sa trace. De cette date à 1900, c’est Auguste père qui dirige l’entreprise. Il est secondé par son fils et par son gendre François Berche, alors dessinateur pour la fabrique. Dans ce contexte, dessinateur est à prendre au sens littéral, pour les motifs abstraits ou figuratifs gravés et non dessinateur de caractères, la fabrique ayant dès au moins 1897, une branche gravure, en particulier pour alimenter son catalogue de galvanoplastie.

Le succès est au rendez-vous. En 1884 la production s’élève à 400 quintaux et la fabrique emploie 34 ouvriers 1.

Ses produits sont présentés dans les expositions, il y remporte plusieurs titres :

  • Diplôme d’honneur à Zurich en 1883 (Groupe II , classe 9 ( Imprimerie et librairie )) ;
  • Médaille d’argent à Paris en 1889 ;
  • Médaille d’argent à Genève en 1896 (catégorie procédés de reproduction) ;
  • Médaille d’or à Bruxelles en 1897.

La presse Valaisanne se fait également souvent l’écho des succès de la société.

Industrie nationale . – La manufacture de caractères en bois A . Martin et Cie, à Ardon, a préparé, en vue de l’Exposition universelle de Paris, divers travaux dont on fait le plus grand éloge. Ces œuvres d’art consistent en affiches de grand format, tirées en plusieurs couleurs, et dont le texte se rapporte à des sujets de théâtre, concerts, chevaux, etc. La gravure des clichés et des lettres est irréprochable et le choix des caractères a été fait avec beaucoup de goût. Il a fallu, pour arriver à un degré tel de perfection, un travail intelligent, persévérant, et un sentiment très développé de l’harmonie des formes et des couleurs. Aussi, peut-on voir dans ces travaux un des plus beaux résultats obtenus jusqu’à ce jour par la typographie. Journal et feuille d’avis du Valais, 6 avril 1889.

Publicité de 1890 parue dans Bulletin Officiel de l'Union des imprimeurs, 1890.

Un article de 1897 évoque une visite de la fabrique par un groupe d’imprimeurs et livre quelques informations techniques :

À Ardon. – On écrit sous ce titre à la Revue, de Lausanne : à la suite d’une gracieuse invitation, le personnel de notre imprimerie a visité dimanche une installation des plus intéressante, celle de la manufacture de caractères en bois de MM. Martin & Cie, à Ardon. Comment se font les lettres d’affiches sur 6 ou 30 cicéros ? Rien de plus simple. Vous prenez une bille de poirier bien sec. Vous la sciez et la débitez aux dimensions voulues, en une quantité de morceaux, petits ou grands, que l’ouvrier intelligent, aidé de la machine habile et précise, vous transforme rapidement en une lettre élégante, bien d’équerre et de hauteur. Mais la maison Martin ne fait pas que des caractères en bois. Elle est supérieurement outillée pour la galvanoplastie, la zincographie, la stéréotypie et tous les procédés les plus modernes de reproduction typographique. Nous avons vu et admiré des épreuves en 3 couleurs absolument remarquables, de planches dues au burin du xylographe ou gravées par d’autres procédés plus rapides de phototypogravure. Sous ce rapport, la Suisse romande peut rivaliser à tous les points de vue avec la production étrangère. La maison Martin s’est d’ailleurs acquis depuis bien des années dans le monde artistique et typographique une réputation européenne. Gazette du Valais, 18 août 1897

Auguste Martin est populaire à Ardon, en effet il emploie beaucoup d’habitants de la ville et sa nécrologie le décrira comme rien moins que le “bienfaiteur pour la localité, [qui] contribua par son énergie et son amour du travail à doter Ardon d’une industrie actuellement prospère et qui fait vivre un certain nombre de nos ressortissants”2. Sa fille est également très impliquée, la famille semble pratiquer une forme de paternalisme industrielle. Madame Berche-Martin, a pour habitude d’organiser des “arbres de Noël” pour les enfants des employés3.

Publicité de 1904 parue dans Le matériel Typo-litho, 1904 (Source Forney)

D’Auguste père à Auguste fils

En 1900 à la mort d’Auguste père, le fils prend la direction de l’entreprise. Son beau-frère François Berche sera responsable de la production puis directeur d’une nouvelle succursale à Paris. Auguste fait construire une petite usine hydro-electrique sur la Lizerne pour alimenter son usine, qui jusqu’alors fonctionnait à la force hydraulique et à la vapeur. En 1908, il fait agrandir aussi ses ateliers 4.

Publicité de 1908 parue dans Bulletin Officiel de l'Union des imprimeurs, 1908. (Source Forney)

En 1912, il ouvre une fabrique de matériel d’imprimerie à Paris, au 16 rue Labrouste5. Les affaires sont florissantes jusqu’à la Grande Guerre, mais, malgré la diversification de l’entreprise (galvanoplastie, matériel, meubles), les conséquences économiques du conflit se font sentir. Elles se traduisent par la chute des valeurs étrangères, et mettent la société – principalement tournée vers l’exportation – en grande difficulté de trésorerie. Pourtant la fabrique garde sa réputation, en témoigne en 1920 une nouvelle visite organisée pour les typographes suisses6.

Mais la société n’échappera pas à la faillite. En 1930, elle est mise en liquidation, la fabrique continue néanmoins ses activités, mais sous le régime d’une société anonyme.

La Manufacture de caractères en bois, S. A., 1930-1935

En 1930, Martin cède donc sa fabrique à une société anonyme, La Manufacture de caractères en bois, S. A.. et disparaît du conseil d’administration de la nouvelle entité.

Une industrie Valaisanne. Sous la raison sociale Manufacture de caractères en bois, S. A., il est fondé une société anonyme qui a son siège à Ardon. La société a pour but l’achat des immeubles de la fabrique A . Martin et Cie, à Ardon, pour le prix de 99 000 fr., la continuation de son exploitation tant en ce qui concerne la fabrication de caractères en bois, que de la galvanoplastie. Le capital social est de 200 000 francs, divisé en 200 actions de 1000 fr. chacune, nominatives. Le Conseil d’administration se compose actuellement de trois membres : MM . Ferdinand Bruno, industriel, d’Ardon, à Nyon, nommé président, François Bonnin, commerçant de Thonon (France), à Nyon, nommé secrétaire, et Armand Genetti, commerçant, de et à Ardon, membre. Hermann Tellenbach, commerçant, d’Ebligen (Berne), est nommé directeur. Journal et feuille d’avis du Valais, 7 août 1930

La société explore de nouveaux débouchés commerciaux, le marché du caractère en bois est depuis longtemps saturé et la demande baisse. En 1931 une annonce7 nous apprend que la manufacture cherche un représentant pour la Suisse germanophone, secteur qui, pour le caractère, est très bien alimenté par la fabrique Roman Scherer à Lucerne. Il s’agit plus probablement de placer les nouveaux produits de la manufacture.

Car en 1932, la manufacture s’est encore diversifiée, cette fois au-delà du domaine de la typographie, elle propose désormais la réalisation d’enseignes lumineuses. Si elle compte à cette date une trentaine d’ouvriers, on ignore combien sont encore dédiés à la branche typographie ?8.

Début août 1933, un incendie détruit une partie de la fabrique, cet accident précipitera une nouvelle faillite, déclarée en octobre 1935.

Renaissance éphémère de la société A. Martin & Cie, 1935-1937

C’est à cette occasion qu’Auguste Martin reprend la main sur ce qu’il devait considérer comme son héritage. En septembre 1935, il crée avec Ignace et Joseph Delaloye, une Nouvelle société anonyme pour la fabrication des caractères en bois, puis avec son beau-frère et fidèle collaborateur François Berche, ils recréent A. Martin & Cie sous la forme d’une société en nom collectif quelques jours seulement avant la faillite officielle de la Manufacture de caractères en bois, S. A..

Auguste Martin & Cie S.A. puis Nouvelle manufacture de caractères en bois S.A. Ardon, 1937-1943

Mais en 1937, les statuts changent à nouveau, Auguste Martin & Cie redevient une société anonyme. Il semble qu’une autre société l’englobe, la Nouvelle manufacture de caractères en bois S.A. Ardon, qui a des activités toujours plus diversifiées. Quoi qu’il en soit, Auguste Martin n’est probablement plus aux affaires, il meurt en 1942. La société à son nom est radiée du registre du commerce en 1943.

En réalité, la fabrique fondée par Auguste en 1875 ne se sera jamais réellement relevée des conséquences de la Première Guerre mondiale. Quand bien même, les années trente sonneront la fin de l’âge d’or des fabriques de caractères en bois.

Les spécimens

Le premier spécimen connu est publié à Paris où le marché est évidemment bien plus propice et étendu qu’à Ardon. En France, outre sa succursale, Martin est distribué par Rœsch, J.B., Montanary H. à Paris, à Bruxelles par Ricard, il est également présent à Milan. Ses caractères sont exportés en Afrique du Nord et jusqu’au Canada. C’est en partie cette dépendance à la demande étrangère qui lui causera des difficultés à la suite de la Première Guerre mondiale.

Le premier spécimen de 1875

Le premier spécimen9, est paru en 1875, année de fondation de la fabrique avec Henri Coderey. L’impression est de qualité médiocre, et certains dessins sont encore maladroits, toutefois il présente déjà plus de 400 numéros. La préface nous apprend qu’il travaille sur bois de bout, à l’aide d’un matériel breveté et qu’il peut réaliser toutes les tailles désirées.

Couverture du premier spécimen connu, conservé et numérisé par la bibliothèque Forney)

Ce spécimen contient 14 séries présentées dans le désordre et avec un numéro par caractère. - Lettres blanches ombrées ; - lettres blanches ; - lettres à couleurs variées, double prix ; - coins pour encadrements ; - passe-partout ; - mains noires ; - lances ; - filets anglais ; - filets. ## Le spécimen A. Martin & Cie Le second spécimen conservé (paru avant 190510), témoigne de la maîtrise acquise dans le dessin de caractère comme de la diversification des produits proposés.

Couverture du second spécimen connu, conservé et numérisé par la bibliothèque Forney)

Les séries sont numérotées. Celles présentées vont de 1 à 400 (antiques, égyptiennes, clarendons), puis de 3400 à 3900 (elzéviers, scripts, fantaisies, chromatiques).

  • Matériel en bois (casses, meubles, etc) pp. 1-17 ;
  • caractères en bois pp. 18-113 ;
  • caractères chromatiques pp. 114-127 ;
  • encadrements galvanos et bois pp. 128-133 ;
  • encadrements galvanos et bois à combinaisons p. 134 ;
  • filets anglais galvanos et bois p. 135 ;
  • clichés pp. 135-136 ;
  • coins p. 139 ;
  • étoiles p. 140 ;
  • manicules galvanos et bois p. 141 ;
  • clichés 142-144

Les affiches spécimens

Si on connaît peu de catalogues, en revanche, Martin imprime des affiches spécimens pour présenter certaines séries de ses caractères. Il propose également des caractères hébreux et arabes (7 sont conservées à la Bâle, mais ne sont pas numérisées).

Poster spécimen, 65 x 50 cm (collection personnelle, fonds Morel)

D’après les exemplaires conservés, il semble qu’il produise aussi beaucoup d’affiches pour mettre en valeur ses bordures et encadrements, souvent en plusieurs couleurs. Il dispose en effet d’un très grand assortiment de ces bordures, d’ornements et de gravures décoratives en galvanoplastie. On peut en voir ici, conservées à la Médiathèque Valais.

Poster spécimen, 123,5 x 97 cm (collection Médiathèque Valais). 11 affiches conservées à la Médiathèque Valais

La bibliothèque Forney conserve également 6 affiches de Martin dont 3 sont numérisées.

La fourniture de caractères bois à des fonderies

Vers la fin des années 20, Martin alimente directement, comme sous-traitant ou fournisseur, la Fonderie Typographique Française. En témoigne un spécimen de la FTF, qui propose des caractères imprimés sous forme de “mots exemples” en partie identiques à ceux du spécimen cité plus haut, sans que le fabricant, A. Martin et Cie, ne soit mentionné (voir ici). La bibliothèque de la Saint-Bride Foundation conserve deux catalogues qui portent le même titre (Caractères d’affiches bois et galvanos, c’est également ce titre qui apparaît en première page de mon exemplaire) l’un attribué à A. Martin & Cie et un autre à la FTF. Mais, même si un des deux spécimens de Saint Bride portent bien la mention A. Martin & Cie (cela reste à vérifier), nous avons là une preuve qu’il travaillait également à la fourniture en gros pour des fonderies soucieuses de proposer des produits pour la production desquels ils n’étaient pas équipés. C’est aussi, à cette date, un signe que Martin a des difficultés à écouler sa fabrication (en l’occurence, du stock de modèles d’avant-guerre et déjà très datés pour certains).

À gauche page du spécimen Martin de Forney, à droite "même" page dans celui de la FTF

Le pantographe breveté par Auguste Martin

Une des informations les plus importantes que l’on tire de la lecture de la préface du spécimen de 1875 (et de la publicité citée plus haut) est que Martin travaille à l’aide d’un pantographe dont il a déposé le brevet en août 1874 sous le titre de : Pour des perfectionnements apportés à la fabrication des caractères en bois. Il évoque également son usage du bois de bout alors qu’en France c’est essentiellement le bois de fil qui est utilisé, et la gravure se fait au canif. Le bois de bout (très utilisé pour la gravure d’illustration au burin) est utilisé pour sa dureté et sa résistance à la déformation, mais n’est pas compatible avec la taille au canif. De même que le bois de fil ne convient pas bien au pantographe car avec ce dernier, la forme de la lettre est directement taillée par la fraise, le bois de fil aura tendance à “s’effilocher” et ne donnera pas un trait parfait.

Voici le texte du brevet :

Brevet n° 104539 en date du 8 août 1874. À M. MARTIN pour des perfectionnements apportés à la fabrication des caractères en bois (Pl XI). Il s’agit d’une machine destinée à la fabrication des caractères en bois de bout pour l’imprimerie. Le bois travaillé dans ce sens possède le précieux avantage non seulement d’offrir une plus grande résistance mais encore de ne jamais se courber. Les imprimeurs qui ont fait usage des caractères en bois de bout ont reconnu comme nous tous les avantages résultant pour eux de ce moyen auquel d’ailleurs nous ne nous sommes arrêtés qu’après un examen approfondi et des essais comparatifs qui nous en ont démontré la supériorité. Cette machine pantographique est placée sur un plateau de fonte auquel elle se trouve fixée à son extrémité par les deux colonnes B, C et les axes D, E, elle est formée de deux galeries articulées F, G, reliées entre elles par les barres H, I, J. Elle se meut sur elle même en un va et vient continuel à l’aide d un système de charnières. Sur la face de la machine se trouvent fixée au point K une mèche et au point L un guide en tête de la mèche et adhérente à son axe se trouve une petite poulie contiguë à une autre poulie mobile M. Ces deux poulies sont mises en mouvement par la courroie sans fin P qui est commandée elle même par la marche des deux tambours Q, R mus par une force motrice quelconque. Sous le guide au point L se trouvent placés les caractères 4 C appelés matrices ou modèles dont le machiniste fait suivre les contours par le guide L en dirigeant sa machine à l’aide de deux poignées S, T. Les mouvements du guide se trouvant copiés par la mèche K à l’aide du système d’attachement parallèle, les caractères placés comme matrices sous le guide se trouvent reproduits instantanément par la mèche ou fraise sur le morceau de bois placé à cet effet sous ladite mèche. _Description des machines et procédés pour lesquels des brevets d’invention …_tome 11, 2e partie, 1877.

Illustration présentée avec le brevet de Auguste Martin

Le pantographe proposé par Martin ne permet que la reproduction à l’échelle 1, ce qui implique une matrice par corps de caractères. Si la qualité et l’homogénéité des caractères en sont accrues, il reste nécessaire de fabriquer un jeu de matrices pour chaque corps de caractères.

L’illustration qui accompagne le brevet montre une machine très proche du pantographe que l’on peut apercevoir sur une photographie issue d’un catalogue de la fabrique italienne Xilografia Internazionale de Legnago près de Vérone, paru dans les années 1920. Il est tout à fait possible que ce soit un modèle inspiré de la machine de Martin, ils y côtoient des machines industrielles plus récentes (sur la gauche) qui permettent la taille de plusieurs corps d’après une seule matrice.

Illustration tirée d'un spécimen de la fabrique Xilografia-Internazionale, vers 1920 (source Anonima Impressori). Sur la gauche, on voit des pantographes industriels, plus récents, qui permettent de produire des caractères de tailles différentes à partir d'une même matrice.

Sources

  • Delaloye, Jean-Pierre, “Manufacture de caractères en bois à Ardon”, dans Valais économique d’hier, d’aujourd’hui et de demain : 200 ans d’histoire économique / [dir.: Géo Bétrisey … et al.] ; [auteurs: Karine Bourgeois … et al.]. Sion: Les Editions Valais valeur ajoutée, 2015.
  • Martin, Auguste, Coderey, H, Fabrication mécanique de caractères en bois : Album spécimen de la maison A. Martin et H. Coderey, Paris, 1875. En ligne, bibliohtèque Forney (consulté le 03/07/2022).
  • Martin, Auguste, Manufacture de caractères en bois et de matérial d’imprimerie., Suisse, 1905. En ligne, bibliohtèque Forney (consulté le 03/07/2022).

Notes

  1. L’Ami du Peuple, 13 avril 1884. 

  2. Gazette du Valais, 28 février 1900. Nécrologie de Auguste Martin 

  3. Le Confédéré, 5 janvier 1895. 

  4. Journal et feuille d’avis du Valais, 8 septembre 1908. 

  5. Bulletin officiel (Union syndicale des maîtres imprimeurs de France), n° 8, août 1912. 

  6. Le Nouvelliste, 5 décembre 1980. Article dans lequel un ancien typographe évoque cette visite dans un contexte de grève due aux bouleversements dans l’industrie typographique. “[…] Si, en 1920, on avait le plaisir et l’avantage de découvrir une fabrique valaisanne de caractères d’imprimerie […]”. 

  7. Neue Zürcher Zeitung, Numéro 1170, 19 juin 1931. 

  8. Feuille d’avis du district de Monthey, 6 septembre 1932. “[…] une fonderie et la fabrique de caractères. Cette dernière fut fondée il y a 57 ans par M. Martin, et a acquis dans toute l’Europe une renommée flatteuse. […] elle occupe en permanence , sans compter le personnel de bureau, 30 ouvriers, tous enfants du pays. La Manufacture de caractères S. A. d’Ardon s’est spécialisée dans la fabrication de caractères en bois et la construction des meubles, casses, etc. […] Depuis deux ans, il a été créé un nouveau département qui s’occupe de la signalisation et de la confection d’enseignes au moyen de deux alliages d’aluminium : le « metallux » et le « sonamétal ». “ 

  9. Le spécimen présenté est conservé et numérisé par la bibliothèque Forney, un autre exemplaire existe à la Houghton Library d’Harvard 

  10. Le spécimen est non daté, la date extrême de 1905 repose sur une lettre interfoliée datée de 1905 dans l’exemplaire de Harvard. On sait également que la maison d’édition Imprimerie Delachaux et Niestlé devient société anonyme en 1904. Celui présenté est conservé et numérisé par la bibliothèque Forney, un autre exemplaire est conservé à la Houghton Library d’Harvard, et au moins un autre dans une collection privée.